Gérer la taille des polices

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Les territoires du vieillissement.
Dialogues interdisciplinaires et regards transatlantiques

COLLOQUE

Les territoires du vieillissement.
Dialogues interdisciplinaires et regards transatlantiques

10-11 mai 2016, ACFAS, UQAM

Ce colloque international met en lumière et vise à enrichir les travaux de l’axe de recherche 2 de l’équipe VIES. L’événement a eu lieu dans le cadre du 84e congrès de l’ACFAS.

Chercheur.es responsables : 

Anne-Marie Séguin, INRS

Patrik Marier, Université Concordia

Vincent Caradec, Université de Lille

Aline Chamahian, Université de Lille

Présentation du colloque : 

Qu’il soit appréhendé en matière de politiques publiques ou d’expériences, un aspect important du vieillissement est sa dimension territoriale qui reste cependant souvent à l’arrière-plan dans les recherches. De nombreux travaux issus de la géographie, de l’urbanisme et de l’aménagement se sont penchés sur le thème du vieillissement en explorant différents aspects du cadre bâti ou de la distribution dans l’espace de la population âgée. Il est plus rare de voir des politologues et des géographes s’interroger sur les échelles d’intervention étatique et leurs effets sur la population âgée ; des anthropologues et des sociologues explorer les territoires vécus ou encore les différentes formes d’habitat, en mettant en exergue la pluralité des expériences des aînés.

Trois axes seront explorés dans ce colloque. Le premier axe concerne les territoires de l’action publique et vise à réunir des travaux qui analysent la manière dont les politiques publiques de la vieillesse et du vieillissement sont territorialisées en Europe, notamment en France, et au Québec. Les résultats de cette territorialisation, qui peuvent se traduire par des inégalités d’accès aux prestations et services entre zones géographiques ou par des relations tendues entre professionnels (dont la coordination peut être rendue difficile par des territoires d’intervention variables), seront aussi explorés. Le deuxième axe s’intéresse aux territoires du quotidien, pratiqués et vécus par les personnes âgées, mais aussi partagés avec autrui, et à la manière dont ils évoluent avec l’avancée en âge : modes d’appropriation de l’espace et possibles difficultés éprouvées ; vécus des transformations de l’environnement de proximité ; formes de sociabilité et dynamiques intergénérationnelles ; participation sociale et citoyenne ; sentiment de sécurité ou d’insécurité, etc. En continuité, le troisième axe porte plus spécifiquement sur les lieux de vie et les modes d’habiter dans la vieillesse. Il s’agit de réunir ici des analyses traitant du domicile ou de la vie en résidence, en EHPAD ou en CHSLD, dans leurs multiples facettes : influence des choix architecturaux sur les modes d’habiter, aménagements et/ou déménagements au fil de l’avancée en âge, manières de s’approprier un lieu de vie collectif, pratiques des professionnels amenés à intervenir dans l’espace privé, etc.

À travers ce regard multidisciplinaire, l’objet « territoires » gagnera ainsi en richesse. Ce dialogue, tout en ouvrant la porte à l’interdisciplinarité, permettra de renforcer les liens entre chercheurs québécois et européens. Dans le contexte actuel de reconfiguration des États-providence, de déploiement de programmes de soutien à domicile pour les aînés et de fortes contraintes budgétaires, l’exercice de comparaison entre différents pays ou régions ne pourra être que fécond.

Le colloque a mené à la direction d’un numéro de la revue « Lien social et politique » dirigé par Vincent Caradec, Aline Chamahian, Patrik Marier et Anne-Marie Séguin

Numéro 79, 2017 « Les territoires du vieillissement »

Résumés des communications

 

LES TERRITOIRES DE L’ACTION PUBLIQUE : ACCESSIBILITÉ, SOINS ET SERVICES

Mot de bienvenue

Anne-Marie Séguin (INRS), Patrik Marier (Université Concordia), Vincent Caradec (Université de Lille) et Aline Chamahian (Université de Lille)

Mot d’ouverture

Monique Vallée, Membre du comité exécutif de la ville de Montréal / Responsable du développement social, communautaire ainsi que de l’itinérance

Représentations des aînés mobilisées dans un projet d’aménagement urbain (transport et hospitalier) et répercussions (Isabelle Feillou et al.)

Isabelle Feillou (Université de Montréal), Juan Torres (Université de Montréal), Marie Bellemare (Université Laval)

La présentation prend appui sur une recherche doctorale portant sur la prise en compte des aînés et de leurs spécificités dans les projets d’aménagement urbain. Nous avons documenté une phase précoce d’un projet de liaison accessible universellement entre un centre universitaire hospitalier (CUSM) et un pôle de transport intermodal nécessitant un réaménagement. La perspective d’analyse s’ancre dans l’ergonomie de l’activité et le design urbain. À partir de l’analyse qualitative d’entrevues auprès d’acteurs centraux et périphériques au projet (n=29), nous avons dégagé quatre systèmes de représentation des aînés. Chacun d’eux est organisé autour d’un triptyque personne (P)‐environnement (E)‐ activité (A) et s’insère dans un contexte (C) particulier. Nous les présenterons brièvement et utiliserons ces systèmes PEAC comme grille d’analyse des données recueillies pour le cas étudié. Nous montrerons que les figures mobilisées dans le projet se rapportent principalement à un système particulier, organisé autour des aînés « vulnérables » et de l’accessibilité universelle. Nous proposerons quelques pistes d’analyse en lien avec les défis d’intégration du vieillissement et de l’hétérogénéité des aînés dans les projets. Nous conclurons sur la nécessité de poursuivre des études de projet pour documenter ces défis et ce, pour outiller les intervenants concernés afin de passer d’un impératif « normatif » d’intégrer le vieillissement à sa concrétisation et son enrichissement.

La réalisation de la responsabilité populationnelle : contraintes et perspectives, le cas du partenariat de Vieillir en santé (Frantz Siméon et al.)

Frantz Siméon (Université de Sherbrooke), Yves Couturier (Université de Sherbrooke), Sébastien Savard (Université d’Ottawa)

La sensibilité pour la thématique du vieillissement s’est accrue depuis la publication en 2002 par l’OMS de sa stratégie pour un Vieillissement actif. La recherche de solutions pour une prise en charge adéquate du vieillissement s’est intensifiée depuis. Dans cette perspective, l’importante réforme de l’organisation des services de 2004, comme celle de 2015, promeut l’intégration des services dans une perspective populationnelle. L’opérationnalisation de ces principes implique la mise en relation d’un ensemble de compétences et d’expertises dans le cadre de montages organisationnels et intersectoriels dont le partenariat constitue une condition de possibilité essentielle. Dans ce contexte, l’Institut National de santé publique du Québec a publié en 2008 une approche pour le « vieillissement en santé » (VeS). Cette approche fut appropriée par un CSSS et ses partenaires dans le cadre de la mise en place de son réseau local de service. Notre étude sur­­ cette expérimentation a permis de mettre en lumière la difficulté de l’établissement à mettre en œuvre la Responsabilité populationnelle en raison d’une ambigüité autour de cette notion. Notre analyse suggère la mise en place d’une structure conjointe ministère/Établissement favorisant un arrimage entre orientations en principe favorables à la responsabilité populationnelle et les commandes du ministère de manière à faciliter la prise en considération des besoins des communautés participant au partenariat.

Des réseaux locaux de services pour les personnes âgées (Normand Carpentier et al.)

Normand Carpentier (Université de Montréal), Édith Robert (CIUSSS du Nord-­de-­l’Île-de-­Montréal), Duygu Ozmekik (CIUSSS du Nord­-de-­l’Île­-de-­Montréal) 

Une étude menée sur un territoire de CSSS nous a conduits à interroger 117 personnes impliquées dans 57 groupes provenant des secteurs publics, communautaires, privés et municipaux. Ces groupes opèrent à l’intérieur d’un réseau local de services et offrent une vaste gamme de soins et de services aux personnes âgées. En utilisant les outils de l’analyse relationnelle en sociologie, nous analysons les actions concertées entreprises par les groupes. Notre plan d’analyse comporte trois volets : analyse réseau, analyse qualitative révélant l’aspect culturel des coordinations, analyse séquentielle des actions. Notre démarche permet de mieux comprendre la portée des activités innovantes qui doivent être déployées afin de maintenir les personnes âgées dans leur milieu de vie. Appliquée sur d’autres territoires — québécois ou français — notre démarche pourrait conduire à des analyses comparatives particulièrement stimulantes pour la mise en place de politiques publiques d’avant-­garde.

LES TERRITOIRES DE L’ACTION PUBLIQUE : ENJEUX POLITIQUES

Représentations des enjeux politiques concernant les proches aidants dans les médias francophones : la disparition de la responsabilité gouvernementale (Patrik Marier et al.)

Patrik Marier (Université Concordia), Isabelle Van Pevenage (Centre de recherche et d’expertise en gérontologie sociale), Corey Guitard (Université Concordia)

La représentation des sous-­populations, comme les proches aidants, a une incidence importante sur la façon dont les décideurs de politiques approchent leurs difficultés. Par exemple, une représentation négative a souvent comme conséquence le développement d’outils de politique cherchant à modifier ou restreindre les activités du groupe visé. Cette étude analyse la façon dont les médias francophones perçoivent les problèmes de politiques vécus par les proches­ aidants en employant une méthode innovatrice visant à découvrir la présence de cadres thématiques (ou frames) incluant une définition de la problématique, sa cause, un jugement moral et une piste de solution. Une analyse sur dix ans (1994-­2004) de sept quotidiens francophones ­ provenant de la Belgique, de la France et du Québec ­ dénote notamment l’insuffisance des services publics, des coûts financiers importants, et une conciliation travail/famille hasardeuse. Une intervention gouvernementale plus généreuse et soutenue figure de façon prédominante parmi les solutions illustrées dans les médias. De plus, des variations notables existent selon le territoire analysé. Par exemple, les journaux québécois (La Presse et Le Devoir) soulignent l’impact négatif des politiques actuelles sur le bien­-être des proches ­aidants et dénoncent les carences des services publics tandis que deux quotidiens européens (Le Soir et Libération) priorisent les coûts financiers et les obligations gouvernementales et sociétales. 

Quand le territoire de l’action publique est peu lisible : comment comparer les politiques de maintien à domicile des personnes âgées en France et au Québec ? (Maude Benoit)

Maude Benoit (Université Concordia)

Les politiques d’accompagnement de la vieillesse des pays occidentaux, longtemps dominées par une approche médicale et hospitalo­centrique, convergent de façon croissante depuis les années 1990 vers le maintien à domicile comme espace de prédilection pour vieillir. Ce recadrage politique du lieu de résidence de l’usager comme lieu de prestation des services entraîne des impacts majeurs en multipliant les lieux de pratique et les sources de prestation de services. Ainsi, une profusion de différents acteurs provenant de diverses entités des secteurs public, privé et du tiers secteur interviennent désormais dans la prestation des services à domicile. Enfin, le flou entourant les frontières du terrain d’intervention de ces politiques et des acteurs qui y sont impliqués est renforcé par le fait que cette action publique répond à d’autres objectifs politiques que le strict maintien à domicile (diminution des coûts du système de santé, création d’emplois d’aide à domicile, etc.). Ce manque de lisibilité du territoire de l’action publique du maintien à domicile pose certainement un problème pour les personnes qui y évoluent, mais aussi pour les chercheurs s’intéressant à la question. Cette communication a pour objectif de contribuer à baliser ce secteur d’intervention et à y établir des repères conceptuels, étapes préalables à la conduite de l’analyse comparée de ces politiques en France et au Québec projetée par l’auteure.

La participation des aînés dans l’action collective urbaine à Montréal : résultats préliminaires de recherche (Julien Simard)

Julien Simard (Institut national de la recherche scientifique) 

Dans le contexte montréalais, la thématique du vieillissement sur place a pris une place médiatique et politique grandissante dans le sillon de l’implantation du programme « Ville amie des aînés ». Or, la capacité des aînés à rester dans les quartiers centraux se trouve aujourd’hui mise en jeu par des transformations urbaines diverses comme la gentrification (Burns et al. 2012). Comprendre alors les aînés comme des producteurs de l’espace (Lefevre 2000) disposant d’agentivité devant les transformations urbaines (Mallon 2014) nous semble donc pressant. Cette communication aura pour but de présenter des résultats de recherche préliminaire récoltés durant la première moitié de l’année 2016 dans le cadre d’un doctorat en études urbaines. L’étude, ancrée dans la gérontologie sociale critique et l’anthropologie urbaine, vise à documenter les discours, pratiques et représentations d’un échantillon d’acteurs aînés impliqués dans l’action collective urbaine à Montréal, surtout autour d’enjeux de logement. Cette recherche se déploie en trois objectifs : 1) documenter les trajectoires d’engagement d’un échantillon d’aînés impliqués dans des mouvements sociaux urbains à Montréal (Villeray, Petite­Patrie, Rosemont) ; 2) comprendre les motivations et rétributions de ces engagements individuels ; 3) décrire les dynamiques entre les engagements de ces acteurs et leurs rapports expérientiels à la ville en changement. 

LES TERRITOIRES DU QUOTIDIEN : ESPACES VÉCUS

La vie devant soi : les besoins et les stratégies des personnes âgées vivant seules à domicile dans différents milieux géographiques (Anne-Marie Séguin et al.)

Anne-­Marie Séguin (Institut national de la recherche scientifique), Éric Gagnon (Centre de santé et des services sociaux de la Vieille­-Capitale), Bernadette Dallaire (Université Laval), Isabelle Van Pevenage (Centre de recherche et d’expertise en gérontologie sociale), Andrée Sévigny, Véronique Billette (Institut national de la recherche scientifique), André Tourigny (Institut national de santé publique du Québec)

Dans un contexte où les autorités gouvernementales souhaitent soutenir les personnes âgées pour qu’elles demeurent dans leur milieu, il importe de mieux comprendre les liens qu’entretiennent les aînés avec ce dernier. La communication présentera les premiers résultats de la recherche « Des besoins aux ressources : diversité des milieux et des stratégies déployées par les personnes âgées » qui repose notamment sur des entretiens auprès de quarante-­cinq personnes âgées, en légère perte d’autonomie, vivant seules avec des revenus modestes au sein de trois territoires : la région de Charlevoix (région essentiellement rurale), le quartier Duberger­-Les Saules (quartier de banlieue de la ville de Québec) et un territoire englobant les quartiers Rosemont, La Petite-­Patrie et Villeray (quartiers centraux de Montréal). Les entretiens ont fait l’objet d’une analyse qualitative de contenu thématique. La recherche place au cœur de l’analyse la manière dont les personnes âgées s’organisent, identifient et priorisent leurs besoins, anticipent l’avenir et s’y préparent, les ressources mobilisées et les stratégies déployées. Elle s’intéresse aussi au rôle respectif de la famille, des réseaux sociaux, des organismes communautaires et des agences étatiques dans le soutien aux aînés en perte d’autonomie. Les témoignages des aînés illustrent la diversité et la complexité des situations vécues et des obstacles, ainsi que les possibilités plus ou moins grandes et les choix à faire.

Les expériences quotidiennes de l’espace, des lieux (places) et du quartier des proches aidants de personnes atteintes de démence (Marjorie Silverman et Elaine Wiersma)

Marjorie Silverman (Université d’Ottawa), Elaine Wiersma (Université de Lakehead)

Cette présentation discute des méthodes, du cadre conceptuel, et des données préliminaires d’une étude qui examine les expériences quotidiennes de l’espace, des lieux (place) et du quartier des proches aidants de personnes atteintes de démence. L’objectif de la présentation est de créer un dialogue au sujet des approches innovatrices pour accéder aux expériences sociales, émotionnelles, et physiques des territoires de la vie quotidienne. Le projet emploie trois méthodes de collectes de données pour explorer comment les proches aidants en milieux urbains, banlieue et semi-­rural perçoivent et s’engagent dans leur quartier, et comment ils sont soutenus localement : Les cartes de réseaux sociaux (Emmel, 2008), les entrevues mobiles à pied (Evans & Jones, 2011), et les photographies prisent par les participants (Clark­Ibanez, 2004). Conceptuellement, l’étude étend un modèle de citoyenneté sociale de la démence (Bartlett & O’Connor, 2010) aux proches aidants, mettant l’emphase sur le fait qu’ils sont des citoyens actifs à l’intérieur et au-­delà de leur rôle d’aidant. Le projet est aussi ancré théoriquement dans le concept de capital social de Bourdieu (Bourdieu, 2011), un concept qui peut élucider l’évolution des expériences des aidants en termes de soutien social, les barrières systémiques ou structurelles, et le potentiel de stigma. 

L’expérience sociale de la maladie d’Alzheimer : premiers résultats d’une recherche franco­-québécoise (Baptiste Brossard)

Baptiste Brossard (Université de Montréal)

Dans cette communication, je propose d’exposer les premiers résultats d’une recherche collective menée au Québec et en France sur l’« expérience sociale de la maladie d’Alzheimer ». À partir d’entretiens biographiques et semi­-directifs conduits avec des patients diagnostiqués depuis moins d’un an, nous interrogeons comment les patients perçoivent la mobilisation (ou non) de leur famille et de professionnels au moment de leur diagnostic, et comment, en retour, ce réseau de soins et ses dimensions locales façonnent leur expérience de la maladie. J’expliquerai dans un premier temps la constitution de cette problématique, dans un contexte où, malgré les nombreux appels à l’« humanisation » des soins, les points de vue des patients restent peu documentés. Je présenterai ensuite les premiers résultats de cette étude en me centrant sur ses dimensions territoriales. Seront notamment abordées les questions de la mobilité (moyens de transport), de l’offre de services autour du domicile du patient, la perception par les patients de leur environnement local (voisins, municipalités, etc.), en vue de comprendre comment ces dimensions affectent l’expérience de la maladie. Pour finir, je reviendrai sur l’objectif théorique de cette recherche, consistant à appréhender le système d’interactions qui se met en place autour des personnes diagnostiquées, et proposerai des conclusions préliminaires ayant trait à la dimension territoriale de ce système. 

Comprendre le vécu et la construction de l’isolement social chez les aînés vivant en milieu rural en France (Ameline Rigal et Thomas Saïas)

Ameline Rigal (Université Paris Descartes), Thomas Saïas (Université du Québec à Montréal)

En France 28 % des suicides concernent des personnes de plus de 65 ans. En outre, l’isolement social constitue un facteur de risque majeur associé au passage à l’acte suicidaire du sujet âgé. Pourtant, les recherches et les interventions préventives se centrent le plus souvent sur les comportements suicidaires. Nous avons pour objectif d’étudier les déterminants de ces comportements (pensées dépressives, notamment) et les facteurs de ces déterminants (isolement social, participation sociale). Notre recherche vise à comprendre le vécu et la construction de l’isolement social chez les aînés vivant en milieu rural. Le territoire investigué est le Limousin, au sein de la région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes. Il s’agit en effet d’un territoire très rural, agricole, où le vieillissement et la dépendance sont les plus marqués en France et où le taux de suicide est particulièrement important. Ainsi, nous menons une étude exploratoire qualitative, basée sur des entretiens individuels auprès d’hommes et de femmes « tout venant » de 70 ans ou plus, natifs du milieu rural, vivant à leur domicile en milieu rural et issus du monde agricole. Nous appuyant sur la Méthodologie de la Théorisation Enracinée (Glaser & Strauss, 1967), nous analysons les données recueillies sur la nature des relations entretenues par ces personnes avec leur(s) environnement(s). Cette communication consistera en une présentation des résultats préliminaires de notre recherche.

LES TERRITOIRES DU QUOTIDIEN : ÊTRE DEDANS ET DEHORS

Territoires barbelés et vieillissement accéléré (Michel Gagnon et al.)

Michel Gagnon (Maison Cross Roads), Stéphane Laurence (Maison Cross Roads), Michel Dunn (Maison Cross Roads) 

Qu’advient-il lorsque, avec l’incarcération, les territoires de vie se rétrécissent subitement ? Ceux de l’intimité, ceux du quotidien et ceux de la présence publique. Dans le cadre de cette communication, nous aborderons le concept d’exclusion territoriale pour éclairer certaines situations vécues par les personnes âgées judiciarisées. Ce ne sont pas tant les raisons qui ont mené à l’exclusion territoriale de la personne qui nous intéressent, autant que les conséquences de celle-ci. Nous allons donc examiner l’impact de l’emprisonnement sur les détenus qui vieillissent en prison et sur les personnes déjà âgées au moment de leur incarcération. Comment s’illustre la diversité des expériences d’exclusion territoriale, notamment chez les personnes âgées judiciarisées ? Considérant qu’il est généralement admis que l’âge de la vieillesse est fixé à cinquante ans chez les détenus, peut-­on trouver dans l’exclusion territoriale des explications porteuses de réponses au vieillissement prématuré de ces personnes ? La communication sera une occasion d’échanges appuyés sur l’expérience développée par la Maison Crossroads, qui travaille depuis plus de 20 ans auprès d’hommes et de femmes qui servent de longues sentences de détention dans les pénitenciers fédéraux du Québec. 

De la prison à la collectivité : réflexions autour du discours d’anciens détenus âgés (Claire Guenat)

Claire Guenat (Université de Montréal)

De plus en plus nombreux, les détenus âgés représentent à l’heure actuelle un cinquième des détenus sous responsabilité fédérale. Reclus, novices ou habitués du système pénal, ils évoluent dans un milieu carcéral caractérisé par l’entremêlement de contraintes physiques et sociales exacerbées par le vieillissement. Leur mise à l’écart due à une incarcération à long terme ou encore le rejet social associé à certains crimes commis par ce groupe d’âge questionnent sur l’avenir des détenus âgés au sein de la collectivité ainsi que sur leur prise en charge dès la sortie de prison. En parallèle, les études s’intéressant à la transition entre la prison et la communauté, offrent un vaste savoir sur l’accès à l’emploi ou au logement ou encore sur la réintégration du réseau social et familial, mais malgré sa spécificité, aucune d’entre elles n’intègre la variable de l’âge à son équation. Prenant appui sur la sociologie « castelienne » et le concept de désaffiliation, la présente communication vise à rendre compte du vécu des personnes libérées de prison à un âge avancé et à exposer les différentes ressources qu’ils mobilisent pour négocier leur quotidien. L’analyse qualitative de dix-­huit entrevues semi­-dirigées menées auprès d’hommes de plus de cinquante ans ayant purgé leur peine au Québec a permis de mettre en avant le rôle fondamental joué par le lien social et plus particulièrement familial, véritable pierre angulaire d’une réintégration sociale et communautaire effective. 

Le retour en collectivité des prisonniers vieillissants : récits sur la déterritorialisation (Joane Martel)

Joane Martel (Université Laval)

Notre étude pancanadienne, effectuée auprès d’intervenants de première ligne ainsi qu’en collaboration avec une quarantaine d’hommes ayant purgé de longues peines d’incarcération, suggère que le retour des libérés dans la collectivité, parfois inhospitalière mais toujours méconnaissable, rappelle la violence de la déterritorialisation du prisonnier qui a vieilli emprisonné durant de longues années. Pour le prisonnier vieillissant, la remise en liberté signifie souvent sa rencontre avec une collectivité peu habile à rencontrer ses besoins spéciaux. La libération signifie également être déraciné du territoire (bien connu) de la prison et introduit de force au sein d’un territoire étranger reconnu par plusieurs comme étant la « collectivité ». Ainsi, au début de sa réinsertion sociale, la collectivité se présente aux yeux du libéré vieillissant davantage comme une non-­communauté, un univers étranger dans lequel il peinera à identifier, pour lui-même, des espaces communautaires stratégiques et sûrs, sans exclusion. Inspirée des études portant sur les mouvements migratoires forcés des réfugiés, cette présentation lie la réinsertion en collectivité des prisonniers vieillissants à la notion de déplacement pour mettre en exergue l’idée selon laquelle la mobilité forcée, la déterritorialisation et l’éloignement géographique constituent les expériences principales à partir desquelles comprendre les modes d’ancrage communautaires des libérés vieillissants.

Reconsidérer le sentiment de « chez soi » dans le contexte du vieillissement et de l’itinérance (Victoria Burns)

Victoria Burns (Institut national de la recherche scientifique) 

Alors que les recherches sur le « vieillir chez soi » se sont multipliées au cours des dernières décennies, peu d’études ont examiné les expériences des personnes âgées qui se retrouvent en situation d’itinérance pour la première fois. Cette étude qualitative porte sur les trajectoires et expériences vécues pendant l’itinérance pour 15 personnes âgées nouvellement en situation d’itinérance (PANSIs) à Montréal. Les résultats révèlent que les trajectoires vers et pendant l’itinérance sont vécues comme un processus dynamique d’oscillation entre le sentiment d’être chez soi et celui de ne pas y être. Lorsque l’interaction entre les personnes et les lieux favorise le contrôle, le confort, l’intimité et la sécurité, les PANSIs tendent à se sentir chez elles. Inversement, lorsque l’interaction entre les personnes et les lieux entraîne un sentiment d’insécurité, de crainte, et d’impersonnalité, les participants tendent à ne pas se sentir chez eux. Des recommandations sont faites pour prévenir l’itinérance chez les personnes âgées et pour inciter les directions de refuges et les décideurs politiques à adopter de meilleures pratiques et milieux de vie pour la population de PANSIs qui s’accroît à Montréal.

LES TERRITOIRES DU QUOTIDIEN : ENJEUX DE MOBILITÉ

Les espaces d'activités et les habitudes de mobilité des aînés en lien avec la participation sociale : premiers résultats de l'étude CURHA (Contrasting Urban Contexts in Healthy Aging) (Pierre Rondier et al.)

Pierre Rondier (CRCHUM), Yan Kestens (CRCHUM), Philippe Gerber (LISER), Basile Chaix (INSERM – Institut national de la santé et de la recherche médicale), Rania Wasfi (CRCHUM), Alexandre Naud (CRCHUM), Benoît THIERRY (CRCHUM), Sébastien Lord (Université de Montréal), Michel Després (Université de Montréal)

On assiste à un intérêt grandissant pour l’aménagement de milieux de vie qui favorisent le vieillissement en santé. Toutefois, les mécanismes complexes impliquant environnement bâti, mobilité quotidienne, participation sociale et le bien-être des seniors restent assez mal compris. Les récents développements technologiques permettant la collecte de données continues et en temps réel ouvrent de nouvelles voies pour comprendre les déterminants environnementaux et sociaux de la santé des aînés. Le protocole de l’Étude internationale CURHA (« Contrasting urban contexts in healthy aging) vise à explorer la mobilité quotidienne, les structures sociales et les indicateurs comportementaux de la santé des aînés. Trois cohortes de 200 à 400 aînés réparties dans trois pays (Canada, Luxembourg, France) ont fait l’objet d’un protocole comparable incluant : surveillance (7 jours) de la fréquentation des lieux et de l’activité physique par capteur portatif; questionnaires de bien-être physique et psychologique; géoquestionnaires permettant de produire des mesures sur les espaces d’activités et les liens sociaux; et enfin l’évaluation qualitative des expériences et des significations des territoires de mobilité et du quartier de vie. Bien que la collecte ait été complétée en janvier 2016, les premières analyses tendent à montrer l’influence significative de certains facteurs socio-environnementaux sur les types de mobilité quotidienne (incluant la marche récréative et l’activité physique).

Parcours quotidiens et significations : les microgéographies de sens d'aînés vivant dans la CMM (Communauté métropolitaine de Montréal) (Michel Després et al.)

Michel Després (Université de Montréal), Sébastien Lord (Université de Montréal), Paula Negron Poblete (Université de Montréal)

Puisque divers aspects de ce qui est jugé un « bon vieillissement » apparaissant liés au maintien de la mobilité quotidienne, plusieurs questionnements surgissent quant aux opportunités de maintenir cette mobilité au sein d’environnements urbains contrastés comme ceux des régions métropolitaines. Pour continuer à vieillir sur place, les personnes âgées développent un ensemble de stratégies de déplacement qu’elles adaptent au gré des circonstances. Comme en font foi plusieurs travaux, les personnes âgées adaptent notamment leurs parcours quotidiens en fonction de leurs expériences personnelles et de « microgéographies de sens ». Ces microgéographies désignent des lieux ou des éléments de l’environnement bâti, naturel et technologique ayant une signification pour l’individu. Cette communication, tirée d’une enquête doctorale en cours s’inspirant de la perspective écologique de Lawton et Nahemow, s’intéresse à l’expérience des parcours quotidiens et aux microgéographies de sens de vingt aînés de 75 ans et plus vivant dans différents types d’environnements urbains dans la Communauté métropolitaine de Montréal. Les discours sur l’expérience et sur les microgéographies de sens ont été recueillis à l’aide d’entretiens semi-dirigés au domicile et à l’aide de parcours commentés. Les résultats préliminaires montrent que les microgéographies de sens varient beaucoup selon les temporalités à travers lesquels la personne envisage ses parcours quotidiens, et selon les modes de vie.

Les pratiques et expériences de mobilité des personnes âgées dans l'arrondissement Rosemont–La Petite-Patrie (Montréal) (Isabel Wiebe et al.)

Isabel Wiebe (INRS), Anne-Marie Séguin (INRS), Philippe Apparicio (INRS)

Les activités quotidiennes des aînés (emplettes, loisirs…) nécessitent le plus souvent des déplacements. Or, avec l’avancée en âge, leurs capacités physiques ou fonctionnelles ont tendance à diminuer et ils se trouvent souvent confrontés à des caractéristiques urbaines inadaptées à leurs besoins. Ainsi, les aînés pourraient avoir à diminuer ou à cesser leurs déplacements. Notre objectif est d’explorer les pratiques de déplacement des aînés vers différents services ou équipements en tenant compte de leurs expériences et des stratégies qu’ils déploient pour répondre à leurs besoins, malgré certaines difficultés. La mobilité implique, suivant Cresswell (2010), outre le déplacement physique d’un lieu vers un autre, l’expérience du mouvement dans le contexte social et géographique au sein duquel la mobilité se déroule. Elle repose aussi sur des ancrages («moorings») qui (re)dirigent les mobilités. À l’échelle des villes, certains lieux ou aménagements (bancs, cafés, abribus) peuvent influencer l’itinéraire des aînés et affecter la faisabilité du trajet (agréable, fatigant, impraticable). Nous aborderons la capacité et les défis des aînés à se déplacer «autrement» (déambulateur, lenteur) dans un espace urbain qui prescrit certaines interactions (monter des marches, traverser une rue assez rapidement) qui peuvent diminuer ou interrompre la mobilité des aînés. L’étude porte sur les personnes de 70 ans et plus et repose sur des entretiens et des relevés de déplacements (GPS).

LES LIEUX DE LA VIE ET LES MODES D’HABITER DANS LA VIEILLESSE

Habiter en centre d'hébergement : variations sur l'espace et le temps (Éric Gagnon)

Eric Gagnon (CIUSSS Capitale-Nationale)

Sur la base d’une enquête ethnographique réalisée dans deux centres d’hébergement et de soins de longue durée au Québec, nous dégagerons quelques-unes des grandes dimensions autour desquelles se structurent l’espace et le temps dans ces établissements. Nous chercherons à mettre en évidence le caractère contrasté, sinon paradoxal, de ces dimensions autour d’une série d’oppositions (espace privé/espace public; milieu de vie/milieu de mort; bruits/silences; rapidité/lenteur; mémoire/attentes). Nous nous pencherons sur un certain nombre de pratiques (horaires, interactions, activités, langage) au travers desquelles ces dimensions se forment et s’expriment. Les centres hébergent des personnes âgées en importante perte d’autonomie, qui ont besoin d’assistance pour réaliser les activités quotidiennes (se déplacer, manger, se laver, s’habiller). Si leur situation de forte dépendance à l’égard des autres caractérise leur condition et leur vie, celles-ci ne s’y réduisent toutefois pas. L’enquête a été réalisée par observation participante; nous avons œuvré comme bénévole dans ces deux centres pendant plus d’une année. Nos observations ont été principalement réalisées dans le cadre des activités de groupe (repas, fêtes, loisirs), mais également lors d’accompagnement en fin de vie; elles ont été faites dans les lieux publics mais aussi dans les espaces privés.

Habiter un CHSLD : l'esthétique empirique de l'aménagement des CHSLD dans le contexte de la politique Milieu de vie (Sébastien Proulx)

Sébastien Proulx (Ohio State University)

Les orientations ministérielles Un milieu de vie de qualité, pour les personnes hébergées en CHSLD visent à encadrer l’aménagement des Centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). Le principe au cœur de cette politique est de voir à ce que les résidents de ces établissements aient accès à des lieux habitables. Malgré tout, il a été montré que les CHLSD peinent à se conformer à ce programme. La difficulté tient du fait que la mise en application de la politique ne peut pas être soumise à une logique de standardisation. Cela serait contraire à la perméabilité des ajustements locaux nécessaires. Néanmoins, même s’il n’est pas souhaitable d’identifier des pratiques aveuglément reproductibles, il paraît perti­nent de chercher à comprendre les conditions de l’habitabilité. Cette communication a pour objectif de présenter une analyse des qualités des aménagements des CHSLD ayant réussi à s’aligner aux principes directeurs de la politique Milieu de vie. La recherche prend appui sur un examen de 98 rapports de visites d’appréciation produits pour les CHSLD de la région de Montréal entre 2004 et 2011. L’analyse a permis d’établir une typologie de cinq qualités présentées par les milieux conforment aux principes de la politique Milieu de vie.

Le chez-soi des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer : un lieu apprenant (Pamela Miceli et al.)

Pamela Miceli (Université Lille), Aline Chamahian (UL-Université Lille ), Vincent Caradec (Université Lille)

Sur la base de travaux soulignant la portée signifiante et capacitante de l’habitat, saisi dans sa dimension à la fois géométrique et relationnelle, nous nous proposons de penser l’espace domestique comme un « lieu apprenant ». Nous étudions son rôle dans les pratiques de communication entre les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer aux stades avancés, leurs proches et les professionnels qui interviennent à domicile ou en EHPAD. Tout d’abord, nous examinerons la manière dont l’espace domestique se trouve mobilisé par les différents acteurs, pour intervenir et communiquer dans le contexte de la maladie d’Alzheimer. Ensuite, nous nous intéresserons à la question des apprentissages, de l’articulation des savoirs formalisés et expérientiels, et de la circulation des usages diversifiés entre proches et professionnels. Nous nous appuierons sur l’analyse d’un matériau qualitatif, constitué dans le cadre d’une recherche sociologique que nous menons actuellement sur les pratiques et compétences communicationnelles développées par les proches et les professionnels auprès des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Deux types de professionnels sont étudiés, dans le secteur paramédical (orthophoniste, psychomotricien et pédicure-podologue) et dans celui des approches psycho-sociales (art-thérapie, clown relationnel et médiation animale).

Ouvrir l'imaginaire de la conception et de l'expérience des espaces du vieillissement : pour une typologie des formes intermédiaires de logement-support (Damien Vanneste et Olivier Masson)

Damien Vanneste (Université Catholique de Lille), Olivier Masson (Université catholique de Louvain)

Situé à la rencontre de l’architecture et de la sociologie, le propos concerne les formes d’habitat intermédiaire en contexte de vieillissement de la population. Une prospection a été menée en Europe de l’Ouest, dans des pays qui privilégient la maison individuelle et pour lesquels les habitats intermédiaires, qui appellent à penser en termes de logements collectifs, constituent un défi intellectuel et social. Au sein de ce terrain délimité, nous avons veillé à diversifier le plus possible les cas rencontrés. En tout, 40 projets ont été visités en s’intéressant à chaque fois au dispositif architectural et aux expériences de vie, au moyen de questionnements relatifs : au potentiel relationnel du dispositif, au travail de mise en espace réalisé par les parties prenantes  et aux usages de cet espace. Au travers des allers-retours entre travail empirique et effort de modélisation, un cadastre de 88 formes de « logements-supports » possibles a été tracé. Notre communication visera à présenter l’intérêt d’une telle typologie pour : d’un point de vue sociétal, proposer une grammaire pour soutenir la réflexion sur ce sujet et soumettre ce champ des possibles à débat ; d’un point de vue scientifique, développer les perspectives d’un programme de recherche sur l’organisation sociale de l’espace en contexte de vieillissement de la population.

Adapter l'habitat au vieillissement : étude de la dynamique d'innovation sociale en Wallonie et à Bruxelles (Ela Callorda Fossati et Florence Degavre)

Ela Callorda Fossati (Université catholique de Louvain), Florence Degavre (CIRTES/ UCL)

Cette communication présente les résultats d’une recherche sur la dynamique d’innovation sociale (IS) dans le champ de l’accompagnement des personnes âgées en Région wallonne et à Bruxelles. Plus précisément, c’est le domaine de l’habitat adapté (HA) qui est analysé sous le prisme de l’IS. Les projets d’HA étudiés s’inscrivent dans l’économie sociale. Le premier projet, d’ancrage urbain, porte sur la cohabitation intergénérationnelle (senior[s] – étudiant·e[s]). Le deuxième, s’articule autour de la construction en milieu rural d’un immeuble de cinq appartements destinés à accueillir des personnes vieillissantes. Les auteures interrogent d’abord le caractère socialement innovant de ces projets à partir de la conception des relations sociales de proximité qu’ils développement. Quel est le profil des habitant·e·s et comment est-il déterminé ? Qu’est ce qui est conçu pour favoriser les relations sociales de proximité et quels sont les obstacles rencontrés ? Deuxièmement, nous étudions le processus de diffusion de ces IS. D’où vient l’idée et comment se concrétise-t-elle ? Quelle place occupent les changements d’échelle territoriale dans la stratégie de diffusion à l’œuvre ? Le matériel empirique exploité est collecté dans le cadre d’études de cas approfondies. Il est principalement composé d’ « archives » (internes et externes) et d’entretiens semi-directifs réalisés auprès des innovateur·trice·s sociales.

Les Seniorales : un habitat sécuritaire au prix de l'insularité (Guy Tapie)

Guy Tapie (École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux)

Avec l’allongement de l’espérance de vie et les progrès de la médecine, une durée de retraite plus longue, une demande d’activités adaptées, les « séniors » constituent une catégorie singulière et diversifiée d’habitants. Singulière au regard de leurs attentes; diversifiée pour des raisons socio-économiques et culturelles, en fonction de l’âge et de l’autonomie/dépendance ou encore de l’histoire personnelle de chacun. Des modes d’habitat originaux se sont structurés, portés par une offre multiple : publique et privée, spécialisée ou généraliste, intégrant des soins médicaux, émanant de l’entourage familial et de collectifs d’habitants. Dans ce cadre, nous nous sommes intéressés à des structures émergentes depuis une dizaine d’années, « les seniorales », une offre de promoteurs privés destinée à des « séniors actifs ». Le type morphologique créé, les pratiques des résidents (entretiens d’une trentaine de résidants) et le concept (entretiens avec les promoteurs) ont été sondés dans le cadre d’une étude sur l’importance que revêtent les attentes de sécurité dans l’habitat contemporain. Notre démarche s’inscrit en priorité dans la recherche architecturale et urbaine en France plus que dans la référence à une sociologie de la vieillesse. Elle privilégie le rôle joué par la conception des lieux et les acteurs qui y participent, croisant alors conditions spatiales ou matérielles et modes de vie pour aborder fabrication et appropriation/réception de lieux de vie.

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